Une toute petite erreur dans la déclaration d’impôt, paf, 50 euros !

Thomas Gunzig 6 octobre 2013

Le « Café serré » de Thomas Gunzig de ce mercredi 2 octobre sur la Première radio…

Bonjour Georges, bonjour tout le monde,

Alors vous le savez, plus que jamais, la grande question qui taraude les gouvernements du monde entier ou presque, c’est « Comment boucler le budget ? ». Ça aurait pu être « La vie a-t-elle un sens ? », « Le bonheur est-il possible ? », « Dieu existe-il ? » ou « Quelle est la couleur d’un Schtroumpf quand on l’étrangle ? ». Mais non, la grande question, c’est « Comment boucler le budget ? ».

Alors pour boucler le budget, nous avons connu toutes les méthodes classiques : un peu plus de taxes, un peu plus d’économies. Mais hélas, hélas, chers amis, il faut bien se rendre compte à l’évidence que tout ça ne suffit plus et que, hélas, le budget est en danger. Mon Dieu, que va-t-on faire ? Que va-t-on devenir ?

Heureusement, heureusement les amis que, nichée dans les bureaux de l’administration, perdue au bout des couloirs sombres de l’appareil d’État ou plane cette caractéristique odeur de café froid et de gaufre rance, au détour d’une plante grasse morte suicidée et d’un poster souvenir de Torremolinos, on trouve encore parfois ce dont le pays a tant besoin. Georges, vous savez ce que c’est ? Hé bien, l’imagination bien entendu. L’imagination, c’est quand même ce qu’il y a de mieux pour trouver des idées nouvelles.

Et alors, cette fois-ci, quelque part dans un bureau inconnu d’une section oubliée d’une administration obscure, ce fût encore un héros discret, un génie anonyme, un artiste ignoré qui a eu cette idée brillante, une grande idée : dorénavant, si on fait une erreur dans sa déclaration d’impôt — même une toute toute petite erreur — hé bien, paf, ça vous coûte 50 euros. C’est chouette, moi j’adore.

C’est l’interprétation du principe du labyrinthe piégé où on met des rats. Vous voyez ? Si le rat passe par la porte bleue plutôt que par la porte rouge, clac, choc électrique dans les pattes. Et puis le rat devient dépressif, alcoolique, il perd son boulot, sa femme le quitte, on lui bousille sa vie.

Hé bien, les 50 euros en cas d’erreur, c’est la même chose.

Parce que évidemment, on pourrait rendre ça lisible, simple, convivial. Mais non, ce ne serait même pas drôle. À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Et la déclaration, c’est fait exprès, c’est plein de pièges très savamment élaborés pour que les gens se trompent. C’est d’ailleurs assez facile à faire.

D’abord, il faut que tout ce qu’on déclare corresponde à des codes qui ne ressemblent à rien et qu’on peut confondre super facilement. Par exemple, le remboursement des frais de déplacement dont le montant figure sur une fiche 281.10 inscrit en regard du code 254 mais les avantages non récurrents liés au résultat se trouve au regarde 243. Ne vous trompez pas. Sinon, 50 euros.

Et puis aussi, il faut poser des questions que même en les relisant plein de fois, on a toujours l’impression qu’il y a un truc qui nous échappe : « Lorsque la transformation ou l’achèvement d’une habitation qui au moment du début des travaux était occupée depuis au moins 15 ans et qui est donnée en location via une agence immobilière sociale entraîne une augmentation du RC qui a pris effet le 1/1/2007 ou ultérieurement, la différence entre le RC initial et le RC majoré ne devra être déclarée qu’à partir du premier jour de la neuvième année qui suit l’achèvement des travaux. ». Attention, soyez bien certains de comprendre, sinon 50 euros.

Bon, alors, à présent qu’on a ouvert cette voie merveilleuse, j’espère qu’on ne va pas en rester là. Les possibilités sont infinies. Par exemple, je pense que dans le même ordre d’idées, on pourrait tout aussi bien, par exemple, taxer les trous de mémoire. Monsieur Lauwerijs, qui a réalisé Alien 1 ? (— Heu…) Paf, 50 euros. Monsieur L., dans le gouvernement Leterme I, qui était le Secrétaire d’État à la Lutte contre la fraude ? (— Oh, j’ai oublié). Allez, Carl Devlies. 50 euros.

Et voilà, comment on sauve un budget.

À lundi.