L’artiste Roger Waters appelle le monde du rock à se joindre au boycott culturel d’Israël

Roger Waters 17 septembre 2013

Dans cette lettre, Roger Waters, membre fondateur du groupe Pink Floyd, appelle ses pairs à participer à la campagne BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) contre l’Etat colonial raciste d’Israël et en faveur des droits du peuple palestinien (Avanti4.be).

A mes collègues du Rock & Roll

A la suite de la mort tragique par balles de l’adolescent Travon Martin et de l’acquittement de son assassin Zimmenman, Stevie Wonder a récemment déclaré lors d’un concert qu’il ne se produirait plus dans l’Etat de Floride tant que ce dernier ne supprimera pas sa loi sur « l’Autodéfense ». Il a ainsi en réalité proclamé un boycott pour des motifs de conscience. J’applaudis sa position et je suis avec lui, vu qu’il rappelle à propos une proposition que j’ai faite dans une lettre écrite le 14 février dernier qui évoque la même question mais qui n’a pas encore été publiée. Le moment est venu de le faire, donc la voici.

Cela fait sept ans que j’ai adhéré à la campagne BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions), un mouvement non violent qui s’oppose à l’occupation de la Cisjordanie par Israël, aux violations du droit international et pour défense des droits humains des Palestiniens. L’objectif est d’attirer l’attention internationale sur ces politiques israéliennes dans l’espoir de mettre un terme à celles-ci. Toutes les personnes de la région méritent quelque chose de mieux que cela.

Pour aller au cœur du sujet, Israël a été déclarée coupable de graves violations du droit international, tant par des organisations des droits de l’Homme que par des hauts représentants des Nations Unies, ainsi que par le Tribunal International de Justice. Parmi ces violations, je n’en citerai seulement que deux :

1. Le crime d’Apartheid :

C’est l’oppression systématique d’un groupe ethnique sur une autre. Par exemple, le 9 mars 2012, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale a exigé d’Israël qu’elle mette fin à ses politiques racistes et aux lois qui enfreignent l’interdiction de la ségrégation raciale et de l’apartheid.

2. Le crime de nettoyage ethnique :

C’est l’expulsion forcée de la population autochtone de sa terre légitime afin de la coloniser avec une population occupante. A Jérusalem Est, par exemple, les familles non juives sont physiquement et systématiquement expulsées de leurs maisons pour les remplacer des familles de colons juifs.

Et il y a bien d’autres crimes.

Au vu de l’incapacité ou du manque de volonté de nos gouvernements et du Conseil de Sécurité des Nations Unies à faire pression sur Israël pour l’obliger à mettre fin à ces violations et faire justice aux victimes, cette tâche retombe sur la société civile et la conscience des citoyens du monde, afin de laver nos consciences et assumer nos responsabilités en agissant. Je vous écris maintenant, frères et sœurs de la famille du rock & roll, pour vous demander de me rejoindre, ainsi que des milliers d’autres artistes dans le monde, afin de proclamer un boycott culturel d’Israël, pour faire la lumière sur ces problèmes et aussi pour soutenir tous frères et sœurs en Palestine et en Israël qui luttent pour mettre fin à toutes les formes d’oppression israélienne et qui veulent vivre dans la paix, la justice, l’égalité et la liberté.

Je m’adresse maintenant à vous à la suite de deux faits récents :

1. Stevie Wonder.

La première semaine de décembre 2012, Stevie Wonder avait été invité pour présider une soirée de gala des Amis des Forces de Défense d’Israël à Los Angeles. Un événement destiné à récolter des fonds pour les forces armées israéliennes. Est-ce que les 4,3 milliards de dollars que nous, contribuables des Etats-Unis, leur offrons chaque année ne sont pas suffisants ? Cette soirée se déroulait juste après que les forces israéliennes ont mené une nouvelle attaque contre Gaza (Opération Pilier Défensif), en commettant, selon l’Observatoire des Droits de l’Homme, des crimes de guerre contre la population assiégée de 1,6 millions de Palestiniens qui vivent là-bas.

En tous les cas, j’ai écris à Stevie pour le persuader d’annuler sa participation. Ma lettre disait entre autres : « Est-ce que tu serais senti à l’aide dans la fête de la police de Johannesburg le soir après le massacre de Sharpeville en 1960, ou à celle de Birmingham - Alabama, pour récolter des fonds pour le corps de police qui a lancé des gaz lacrymogènes et des tonnes de jets d’eau contre ces gars qui revendiquaient l’intégration en 1963 ? ».

L’archevêque Desmond Tutu a également écris une lettre passionnée à Stevie et 3.000 autres personnes ont signé une pétition via le site change.org pour que Stevie, et c’est son grand mérite, annule finalement sa participation.

2. Au début de cette semaine, j’ai prononcé un discours aux Nations Unies, qu’on peut retrouver sur Youtube si vous êtes intéressé à l’écouter.

Ce qui est intéressant avec ces deux histoires, c’est qu’il n’y a pas eu UNE SEULE mention d’aucune d’elles dans les principaux médias des Etats-Unis.

La conclusion claire serait que les médias des Etats-Unis ne sont pas intéressés par la situation difficile du peuple palestinien, ni d’ailleurs par la situation du peuple israélien. Nous pouvons tout au plus attendre d’eux qu’ils s’y intéressent de la même manière qu’ils ont finalement traité la question de la politique de l’apartheid en Afrique du Sud.

A l’époque de l’apartheid en Afrique du Sud, il n’y a eu au début que quelques artistes qui ont refusé de jouer là-bas en exerçant un boycott culturel, puis les gouttes sont devenues un ruisseau, puis une rivière, puis un torrent, puis une inondation. Vous rappelez-vous de Steve Van Zant, Bruce et tous les autres ? « Nous ne jouerons pas à Sun City » disaient-ils. Pourquoi ? Parce que, comme l’ONU et les tribunaux internationaux de justice, ils avaient compris que l’apartheid était mauvais.

La communauté sportive a alors rejoint le mouvement ; personne n’allait plus jouer au cricket ou au rugby en Afrique du Sud. Ensuite, c’est finalement la communauté politique qui s’est également unie. Nous avons tous, en tant que communauté mondiale, musicale, sportive et politique, élevé nos voix à l’unisson et le régime d’apartheid en Afrique du Sud est tombé.

Peut-être que nous sommes maintenant arrivé à un point charnière par rapport à la situation entre Israël et la Palestine. Des deux côtés il y a des bonnes personnes qui méritent une juste solution à leur situation. Chacune et chacun d’entre eux mérite la liberté, la justice et l’égalité des droits. Tout récemment, l’ANC, le parti au pouvoir en Afrique du Sud, a approuvé la campagne BDS. Nous y sommes presque. Je vous demande de vous joindre à moi et à tous nos frères et sœurs dans la société civile mondiale en proclamant notre rejet de l’apartheid en Israël et en Palestine occupée, en nous engageant à ne pas nous produire en Israël et à refuser tout financement auprès d’une institution liée au gouvernement d’Israël, et cela jusqu’à ce que qu’Israël respecte le droit international et les principes universels des droits de l’homme.

Source :
https://www.facebook.com/notes/roger-waters-the-wall/a-note-from-roger-waters-august-18-2013/697457193602067
Traduction française pour Avanti4.be : Sylvia Nerina