, , 1er novembre 2012
Plutôt que de s’attaquer aux vrais causes et responsables de la crise, le gouvernement a trouvé une cible plus facile : les travailleurs sans emploi. A partir du 1er novembre, plus de 150.000 d’entre eux verront leurs allocations diminuer progressivement jusqu’à un forfait inférieur au seuil de pauvreté. La FGTB wallonne organise la résistance...
Dégressivité accrue des allocations de chômage, limitations des allocations d’insertion dans le temps, détérioration des périodes assimilées pour la pension, élargissement du contrôle de disponibilité, dégradation de la notion d’emploi convenable...
Depuis des mois, la FGTB wallonne tire la sonnette d’alarme : la réforme du chômage va précipiter des centaines de milliers de citoyens dans la pauvreté.
Le 1er janvier dernier, c’est le compte à rebours pour les bénéficiaires d’allocations d’attente qui se mettait en marche : d’ici maintenant 26 mois, s’ils n’ont pas accumulé assez de jours de travail, près de 40.000 d’entre eux seront exclus du chômage.
Demain, ce sont les bénéficiaires d’allocations de chômage qui verront leurs allocations progressivement diminuer.
S’il existe certaines exceptions (pour connaître les détails pratiques de la mesure, consultez le site de la FGTB fédérale), plus de 150.000 chômeurs se retrouveront d’ici peu avec une allocation mensuelle inférieure au seuil de pauvreté : 1000€/mois pour un isolé, 1300€ pour un parent seul avec un enfant, 1500€ pour un couple d’adultes...
Ces milliers de personnes n’auront d’autre choix que de se tourner vers le CPAS pour tenter de survivre ! Rappelons que, dans le même temps, le gouvernement s’est engagé à sortir 380.000 Belges de la pauvreté d’ici 2020. Si la situation n’était pas aussi grave, cette promesse prêterait à sourire...
Cette réforme est d’autant plus scandaleuse qu’elle se met en place dans un contexte économique désastreux : restructurations aux quatre coins du pays, chômage de masse, inégalités grandissantes...
Mais, parallèlement à ce bain de sang social, la réforme du chômage renforcera également la précarisation du marché de l’emploi. Car, en s’attaquant aux chômeurs, ce sont les conditions de travail et les salaires de tous les travailleurs qu’on tire vers le bas.
De quelle marge de négociation les travailleurs disposent-ils quand des centaines de milliers de demandeurs d’emploi, contrôlés, sanctionnés et précarisés de toutes parts n’attendent que de prendre leur place ?
Une mise en concurrence des travailleurs qui ne profite qu’au patronat et aux actionnaires !
Ces dernières années, les militants de la FGTB wallonne se sont mobilisés à de nombreuses reprises contre la précarisation des demandeurs d’emploi.
Et, cette fois-ci encore, ils n’entendent pas laisser passer l’appauvrissement généralisé que le gouvernement met en place. Dans chacune des dix Régionales wallonnes, des Travailleurs Sans Emploi (TSE) s’organisent et se mobilisent.
FGTB-Wallonne
http://www.fgtb-wallonne.be
Le nouveau système de dégressivité des allocations de chômage entre en vigueur ce 1er novembre. Le montant des allocations de chômage diminuait déjà en fonction de la durée du chômage, mais ce processus est aujourd’hui accéléré et les allocations seront réduites à un minimum forfaitaire très bas.
Ce nouveau régime s’appliquera à tous les chômeurs complets de longue durée, qu’ils soient cohabitants, isolés ou chefs de ménage. Les chefs de ménage et les isolés seront donc aussi concernés. La mise en œuvre de ces nouvelles règles coïncide avec une vague de licenciements et une poussée du chômage. La probabilité que les chômeurs trouvent rapidement un nouvel emploi est faible, alors que le marché de l’emploi se détériore rapidement.
La CSC dénonce un appauvrissement collectif des chômeurs. Aujourd’hui déjà, plus d’un tiers des chômeurs sont pauvres et cette situation ne fera qu’empirer. Un chef de ménage chômeur de longue durée (c’est-à-dire sans autre revenu dans le ménage) verra le montant de son allocation réduite à environ 1.090 euros par mois, c’est-à-dire 31% en dessous de la norme de pauvreté européenne. De ce fait, le risque de pauvreté des enfants augmente sensiblement. Pour un isolé, le montant minimum de l’allocation sera de 916 euros, c’est-à-dire 12% en-dessous de la norme de pauvreté européenne.
Pourtant, la Belgique s’est engagée, dans le cadre de la Stratégie Europe 2020, à réduire de 380.000 unités le nombre de personnes exposées à un risque de pauvreté ou d’exclusion d’ici 2020. Or aujourd’hui, le nombre de personnes exposées à un risque de pauvreté ou d’exclusion a encore augmenté de 65.000 unités, ce qui porte à 445.000 la réduction totale à réaliser. Dans une circulaire, l’Union des Villes et des Communes de Wallonie exprime sa crainte de voir de nombreux chômeurs s’adresser à l’avenir aux CPAS et le niveau local ainsi confronté à une sérieuse augmentation de ses dépenses.
Pedro Rodriguez : “Le gouvernement prétend, à travers ces mesures, avoir choisi le chemin qui va de l’Onem à l’emploi. Il a en réalité fait le choix du chemin qui va de l’Onem au Cpas. Il a choisi le chemin qui éloignera le demandeur d’emploi de l’emploi. En vivant avec 3 euros par jour, quand il a payé son loyer et ses factures d’énergie, sa remise à l’emploi sera contrecarrée par les problèmes de surendettement, de santé, et de logement(…). Si on veut favoriser la remise à l’emploi, il est indispensable de prendre en compte les obstacles de la remise à l’emploi et par conséquent de remettre en question la dégressivité accrue des allocations. ”
La CSC attend du gouvernement une politique d’assainissement des finances publiques qui permette de relancer l’emploi et de lutter contre la pauvreté et l’exclusion au lieu de la favoriser. La CSC revendique un accompagnement de qualité et un suivi rapproché de toutes personne à la recherche d’un emploi. La CSC insiste également sur la nécessité de créer des emplois durables et de qualité.
Pedro Rodriguez : “ Il faut décider de s’attaquer au chômage plutôt que de s’attaquer aux chômeurs. C’est l’emploi convenable qui est indisponible, pas les demandeurs d’emploi. Il y a en moyenne une offre d’emploi du Forem ou d’Actiris pour 40 demandeurs d’emploi. Lutter contre les abus, d’accord. Cela veut dire aussi qu’il faut évaluer les milliards d’euros octroyés aux politiques d’emploi et les orienter dans une véritable lutte contre le chômage (structurel) par la création d’emplois convenables. Il n’est donc pas correct et judicieux de faire porter toutes les responsabilités aux demandeurs d’emploi. Les pouvoirs publics doivent, eux aussi, faire leur part du travail, tout comme les employeurs. Les travailleurs sans emploi de la CSC tiennent 20 propositions à leur disposition, pour s’attaquer aux causes du chômage et activer la création d’emplois convenables.
Au cours des derniers mois, la CSC a mené des actions contre la dégressivité programmée. Ces actions ont débouché sur le fait que deux tiers des demandeurs d’emploi échappent à la dégressivité. Par exemple : les personnes qui peuvent faire valoir au moins 20 années de carrière, sont âgées de 55 ans ou présentent une incapacité de travail d’au moins 33% ne seront pas concernées par la réduction des allocations de chômage. La CSC continue de réclamer d’autres rectifications.
La CSC a pris des dispositions pour informer ses affiliés sur les nouvelles règles. Des séances d’informations seront organisées dans les régions.
CSC
http://www.csc-en-ligne.be
L’arrêté royal relatif à la dégressivité renforcée des allocations de chômage entrera en vigueur au 1er novembre 2012. La Ligue des droits de l’Homme s’oppose à cette fausse solution que constitue la dégressivité des allocations de chômage et dénonce la précarisation des chômeurs qu’elle engendre.
En effet, les problèmes que pose cet arrêté sont multiples.
Sur le plan juridique tout d’abord, ce type de mesure contrevient, non seulement à l’article 23 de la Constitution, mais aussi aux articles 9 et 11 du Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels qui consacrent le droit de toute personne à la sécurité sociale, y compris les assurances sociales, ainsi qu’à une amélioration constante des conditions d’existence. Ces dispositions comportent à tout le moins une obligation de non régression au niveau des droits acquis (obligation de standstill).
Sur le plan politique ensuite. La dégressivité des allocations de chômage poursuit, dans le chef du gouvernement, un but précis : inciter les chômeurs à trouver plus rapidement un emploi. Sachant que ces mesures concernent près de 130 000 personnes, on imagine que le gouvernement a pris cette mesure de manière responsable avec l’assurance que, en cette période faste, quelque 130 000 emplois correctement rémunérés attendent, en piaffant d’impatience, ces allocataires. Si ce n’est pas le cas, c’est prendre un pari sacrément risqué en termes d’appauvrissement des chômeurs. Alors que les allocations des chômeurs de longue durée sont déjà inférieures au seuil de pauvreté, cette réforme fait donc courir un risque accru de tomber dans le dénuement le plus complet, la diminution des allocations pouvant atteindre jusqu’à 41,5% pour les personnes qualifiées de "cohabitants".
Le contrôle et l’accompagnement renforcés des chômeurs peuvent-ils être créateurs d’emploi ? Cela reste à prouver… tout comme le fait que l’intensification des recherches d’un emploi sous la contrainte financière puisse résoudre le problème du chômage alors même qu’il y a pénurie d’emplois et qu’aucune politique d’amélioration de la mobilité ou d’accès aux équipements sociaux (crèches, garderies…) n’est mise en place pour favoriser la mise à l’emploi.
Par ailleurs, le renforcement de la dégressivité des allocations de chômage s’inscrit dans un renforcement de la culpabilisation et de la stigmatisation des chômeurs. Dans un climat marqué par une pénurie d’emploi, cette dégressivité accrue aura pour seule et unique conséquence la baisse généralisée des revenus de remplacement. Au lieu de s’atteler à relever les revenus, tant de remplacement que ceux obtenus par le travail, le gouvernement précarise les chômeurs et s’oppose, par là, à la relance économique du pays.
Enfin, en termes de budget, le gouvernement fédéral manifeste le désir de se décharger à nouveau, dans un bel élan de solidarité dépourvu d’états d’âme, du poids financier (et statistique) des publics les plus fragiles sur les CPAS (80% des chômeurs exclus émergeant au CPAS ont un niveau de scolarité très bas). Rappelons à cet égard une étude des Fédérations des CPAS mentionnant que, entre 2008 et 2011, leurs charges ont augmenté de près de 290%.
Par delà la protection des demandeurs d’emploi, c’est l’ensemble des travailleurs qui sont indirectement affectés par cette mesure. En effet, en plaçant les travailleurs dans une situation d’insécurité accrue en cas de perte d’emploi, le gouvernement affaiblit leur pouvoir de négociation et incite les employeurs à brader les conditions de travail et la rémunération des emplois existants. Alors que les annonces de licenciement massif s’accumulent, le gouvernement adopte une attitude contradictoire et déconcertante : d’un côté, il annonce soutenir les futurs chômeurs, d’un autre, il les menace s’ils ne retrouvent pas vite un emploi, n’importe lequel.
En conclusion, en laissant entrer en vigueur cet arrêté royal, le gouvernement fédéral porte atteinte aux fondements même de notre assurance chômage, pilier essentiel de la sécurité sociale, et pousse des dizaines de milliers de personnes vers une précarisation accrue.
Ligue des droits de l’Homme
CONTACT PRESSE : Sébastien ROBEET. Tél. : 0473.73.89.53
http://www.liguedh.be/