16 décembre 2013
Étonnant. C’est ainsi qu’on pourrait décrire le retour de l’homme politique wallon Vincent Decroly. L’ancien parlementaire Écolo revient sur la scène politique après dix ans d’absence. Il va désormais participer à un nouveau mouvement politique appelé VEGA, pour Verts et à Gauche. Ou comment un ancien « chevalier blanc » se décrit maintenant comme rouge et vert…
En 2003, Vincent Decroly a quitté la Chambre. Il en avait assez. Alors qu’il avait participé à la création d’Écolo en 1983, il ne pouvait plus cautionner l’évolution de ce parti. En 1999, Écolo a fait partie du gouvernement arc-en-ciel et ce gouvernement ne lui convenait pas : trop néolibéral, trop fidèle à l’Union européenne, trop de cadeaux au patronat, trop d’activation des chômeurs, trop d’expulsions de sans-papiers…
C’était la période faste de l’altermondialisme. Les perspectives proposées par ce mouvement lui convenaient beaucoup mieux. Cela l’a amené à quitter son parti en 2001 et à monter à la tribune de la Chambre avec un t-shirt et une casquette du Forum social mondial de Porto Alegre sur la tête. Il a critiqué la politique du gouvernement et s’est fait jeter manu militari en dehors de l’hémicycle. C’était un peu spectaculaire mais Decroly n’était cependant pas un politicien qui faisait du spectacle.
À l’époque, j’étais encore actif à la LCR-SAP et je l’ai rencontré à plusieurs reprises. Je me suis aussi retrouvé à ses côtés lors d’une conférence publique. Il s’est toujours montré un partenaire de conversation modeste, correct et calme avec qui il était même possible d’évoquer posément des désaccords. Je me souviens du discours qu’il a tenu sur la tombe d’un ami et camarade mort tragiquement en 2001. Dans ce cimetière froid de Jumet, il a parlé de ce triste arc-en-ciel en se référant au gouvernement belge.
En 2003, il a quitté la politique. Il ne voulait plus construire un autre mouvement politique après la déception vécue dans le parti qu’il avait contribué à construire. Il a suivi des études de droit et poursuivi la lutte pour un autre monde sur un autre front. D’un côté nous trouvions cela dommage, d’un autre côté, cela forçait le respect. Un homme respectable. N’oublions pas que du temps de la Commission Durtroux il était quasiment l’homme politique le plus populaire en Belgique francophone. Et il a ensuite volontairement disparu du feu des projecteurs…
Mais maintenant, il est de retour. Il n’a donc pas perdu le virus de la politique. « J’étais déjà écologiste, je suis devenu anticapitaliste » a-t-il dit lors de son retour. Entre-temps, il devenait clair qu’il allait rejoindre VEGA, une « coopérative politique » originaire de Liège qui a réussi à obtenir un élu au conseil communal dans cette ville lors des dernières élections communales. Désormais, ils étendent en commun VEGA à l’ensemble de la Belgique francophone. VEGA se profile autour de trois concepts : écologie, socialisme et démocratie.
Certains dans la gauche (radicale) pensent que Decroly a fait un mauvais choix étant donné qu’ils croient que le moment est venu pour tous de se positionner derrière le PTB. Mais Decroly reste sceptique face aux relents de vieux « socialisme réel » et de productivisme qu’on peut encore discerner au PTB. Et il a donc choisi un mouvement moderne, radicalement démocratique et écosocialiste. Cela me semble logique. En outre, le fait de se lancer dans son propre mouvement ne ferme pas les possibilités de travail commun futur et signifie encore moins qu’il veuille vouer aux gémonies d’autres partis de gauche ou verts.
Vincent Decroly, qui fut à l’époque le porte-parole d’une population sous le choc de l’affaire Dutroux est à nouveau en piste. Il faudra voir si son projet est viable. Les premières interviews qu’il a données sont prometteuses. En particulier, le ton radical saute aux yeux. Il a souligné que « le vieux rêve qu’il serait possible de réformer le capitalisme est dépassé aujourd’hui ». Nous ne pouvons que souhaiter beaucoup de succès à un homme politique authentique comme Decroly. Et la force d’initiative et l’audace de VEGA forcent l’admiration.
David Dessers est membre de l’organisation anticapitaliste flamande « Socialisme 21 ». Il a été élu conseiller communal à Louvain aux élections d’octobre 2012 sur une liste « Groen ! » et il co-anime l’association écologiste « Climaxi ».
Source :
http://www.socialisme21.be/actueel/de-terugkeer-van-vincent-decroly/
Traduction française pour Avanti4.be : Martin Laurent